Vous avez pour objectif de rendre votre app plus engageante et augmenter la rétention de vos utilisateurs ? Vous êtes au bon endroit, la gamification est faite pour vous.
Gamification vient de l’anglais “game” ou “jeu”. En français, on pourrait plutôt utiliser le terme “ludification”, dérivé de “ludique”... Il y a donc du jeu là-dessous !
La gamification est l’utilisation des mécanismes du jeu, tels que le fait d’accomplir des missions, de récolter des badges, appliqués dans d’autres domaines. Ils sont très variés et touchent aux situations d’apprentissage, de travail ou de santé. Bref, des situations pas toujours très fun et engageantes…
Et justement, partant du constat que l’humain ADORE jouer, la gamification vise à augmenter l’acceptabilité et l’usage de ces produits moins attractifs.
La gamification peut être déployée en tant que levier sur tout type de support : physique, numérique, web ou app. Personnellement, je trouve que l’application mobile est un terrain de jeu privilégié pour profiter de la puissance de la gamification, de par le lien particulier qu’elle entretient avec l’utilisateur.
Oui, cela fonctionne vraiment, et plutôt très bien ! De plus en plus d’entreprises du numérique (mais pas que) se tournent vers cette technique qui a largement fait ses preuves.
Des études menées par Tech Report en octobre 2023 démontrent plusieurs points :
89 % des personnes passeraient plus de temps sur une application si elle comportait des éléments de gamification.
Les entreprises qui mettent en œuvre la gamification sont 7 fois plus rentables que celles qui ne le font pas.
La gamification de votre site peut augmenter la fidélité de vos clients de près de 30 %.
Finalement, je suis certain que vous aussi, vous avez été confronté à des mécaniques de gamification, peut-être sans même vous en rendre compte !
Ces entreprises (et tant d’autres) ont su exploiter au mieux les points cruciaux de la gamification pour créer des expériences particulièrement engageantes et avoir un impact sur la rétention de leurs utilisateurs.
L'application mobile de Duolingo a atteint une expansion remarquable, comptant plus de 70 millions d'utilisateurs à travers le monde. La gamification joue un rôle marketing crucial dans l’engagement des utilisateurs de Duolingo : son interface est conçue pour offrir une expérience immersive et plaisante, avec un tone of voice enthousiaste et positif, ponctué de nombreux points d'exclamation, pour encourager l'utilisateur à se sentir accompli à chaque étape de son parcours. Cela représente un point clé pour optimiser la rétention et l’engagement.
Duolingo propose également un système de progression et de récompenses, incitant ainsi les utilisateurs à persévérer dans leur apprentissage linguistique et à booster leur productivité.
Le Nike Run Club (disponible sur iOS et Android) offre aux utilisateurs une motivation constante pour maintenir et atteindre leurs objectifs d'entraînement. Grâce à des mécanismes et des fonctionnalités de gamification intégrés, l'application favorise l'engagement et la fidélisation des coureurs tout en rendant leurs séances d'entraînement plus agréables.
Via cet outil, l’entreprise incite les utilisateurs à enregistrer leurs séances et à participer à des défis organisés avec leurs amis coureurs. Les défis, présentés sous forme de fenêtres colorées en plein écran, offrent des récompenses attrayantes pour les participants, créant ainsi un sentiment d'urgence et motivant même les utilisateurs indécis à s'engager pleinement.
BeTomorrow capitalise sur son passé d'éditeur de jeux mobiles et exploite les stratégies de gamification pour concevoir des expériences impactantes, tant pour ses clients que pour ses collaborateurs et ce, en utilisant plusieurs outils. Pour un leader du divertissement/jeu d’argent, nous avons conçu une série de mini-jeux à récompenses aléatoires afin de booster l’engagement de leurs joueurs. Ces mini-jeux n’étaient actifs que pour un certain type de parties. L'opération a eu pour effet de multiplier par 150 le nombre de parties jouées, boostées par la gamification.
Au sein de notre entreprise, nous avons organisé une compétition de billard ouverte à tous : la BetoCup.
Pour engager l’ensemble des BeTonautes, y compris les non-participants ou ceux éliminés, sur toute la durée de l’évènement, nous avons créé deux produits gamifiés : 1. La BetoBet, une application de pari. Point fort : les paris peuvent être créés à la volée en cours de match (le prochain coup sera-t-il gagnant ? Y-aura-t-il faute ?).
2. La BetoStream, une application de streaming. Point fort : les matchs sont retransmis en direct avec un affichage de messages contextuels.
Autant vous dire que cet événement reste encore dans les mémoires ! ;)
Maintenant que vous avez identifié les bénéfices de la gamification des applications, comment réussir à s’en servir ? Quels sont les outils qui s’offrent à vous ?
Suivez le guide, je vais vous parler de l’Octalyse !
Quand on parle de gamification, les premières réactions qui viennent sont souvent : “Ah oui, c’est le fait de gagner des badges dans une app, c’est bien ça ?”.
Et bien, oui et non. En réalité, c'est plus profond et subtil que cela !
De tous les auteurs et autrices qui se sont penchés sur ce sujet, celui qui m’a le plus marqué et qui ne me quitte plus, c’est Yu-Kai Chou, l’un des pionniers de la gamification. Il a inventé l’Octalyse après 12 ans de recherches et de travaux dans le domaine de la gamification. Comme son nom l’indique, l’Octalyse représente un octogone dont chaque extrémité correspond à un motivateur psychologique présent en chacun de nous.
Effectuons un tour d’horizon des différents motivateurs de Yu-Kai Chou !
Au sommet de l’Octalyse se trouvent les motivateurs “vertueux”, également nommés “White hat gamification” par Yu-Kai Chou.
En clair, si une activité est intéressante parce qu'elle permet d'exprimer sa créativité, de maîtriser une compétence nouvelle ou de donner du sens, vos utilisateurs devraient se sentir plutôt bien et continuer d’utiliser l’application mobile de votre entreprise sans effort.
On y trouve donc les points suivants :
Meaning : Sens épique et vocation. L’utilisateur est convaincu qu’il fait quelque chose de plus grand que lui, qu’il a été choisi. Les utilisateurs peuvent investir beaucoup de leur temps pour apporter à la communauté. Exemple : Wikipedia - participer au partage du savoir mondial.
Accomplishment : Développement et accomplissement. L’utilisateur a une motivation pour progresser, dépasser des challenges, remporter des concours, développer des compétences. Exemple : League of Legends - l’évolution constante de sa progression.
Empowerment : Libérer la créativité et le feedback. Les utilisateurs peuvent créer des choses qu’ils pourront observer et pour lesquelles ils recevront du feedback. Cela permet de ne jamais s’ennuyer grâce aux possibilités infinies de combinaisons. Exemple : Lego - des combinaisons infinies avec quelques briques.
À l’inverse, les motivateurs “vicieux” ou “Black Hat gamification” sont positionnés plus bas. Ces motivateurs sont très efficaces pour permettre à votre entreprise d’engager et de retenir vos utilisateurs… mais ils s'essoufflent plus vite également. Si vos utilisateurs effectuent des actions dans la crainte constante de perdre quelque chose, cela peut, à la longue, les détourner de votre produit.
On retrouve ainsi :
Scarcity : Rareté et impatience. Quand on ne peut pas avoir quelque chose, on le veut encore plus et on y pense tout le temps. Beaucoup de jeux utilisent des “Rendez-vous à soi même”, par exemple en se basant sur le principe du : “Revenez dans 2H00 pour obtenir cette récompense”. Exemple : Assassin’s Creed - quêtes annexes des jeux AAA.
Unpredictability : Imprévisibilité et curiosité. Si l’on ne sait pas ce qui va arriver, notre cerveau est plus engagé, on réfléchit davantage, on est plus attentif. C’est pour cela que l’on regarde des films ou que l’on lit des livres et que l’on déteste être spoilé. Exemple : Mario Kart - briser les caisses pour savoir ce qu’elles contiennent.
Avoidance : Peur de la perte et évitement. Nous tentons toujours d’éviter les situations négatives. Les systèmes promotionnels s’en servent parfaitement pour nous inciter à consommer afin de ne pas passer à côté de la baisse de prix. Exemple : les promotions.
Décryptons les deux derniers motivateurs clés de l'Octalyse. Placés aux extrémités droite et gauche, ils ne sont pas intrinsèquement vicieux ou vertueux. Cependant, leur positionnement n'est pas fortuit. Yu-Kai Chou distingue ces motivateurs selon leur lien avec les hémisphères droit et gauche du cerveau.
Le cerveau droit incarne la créativité, l'expression de soi et les aspects sociaux. Ces stimulateurs sont intrinsèques, car l'individu n'a pas besoin d'une incitation externe pour les mettre en œuvre ; l'activité en elle-même est gratifiante. La première composante, l'influence sociale, repose sur le désir d'être influencé et l'envie d'atteindre le niveau de compétence observé chez un pair. Cela se manifeste notamment à travers les interactions sur les réseaux sociaux, où l'excellence d'un ami peut susciter une motivation à suivre ses traces.
Axés sur la logique, les calculs et la propriété, ces stimulants reposent sur des motivations extrinsèques : l'utilisateur est incité par le désir d'acquérir quelque chose. Il est donc crucial de mettre en place des systèmes de récompense efficaces, car une diminution de celles-ci pourrait entraîner une perte de motivation chez les utilisateurs.
L'un des moteurs essentiels du cerveau gauche est la notion de propriété. Les utilisateurs sont motivés par le sentiment de posséder des éléments dans l'application. Dès lors que la notion de possession est introduite, les utilisateurs sont encouragés à améliorer leurs possessions ou à en acquérir davantage. Un exemple parlant est celui des Sims, où le désir constant de développer sa famille et son patrimoine stimule l'engagement des joueurs.
La gamification des applications va donc plus loin que de simples badges et barres de progression. Au contraire, pour engager sur la durée mieux vaut s’appuyer sur d’autres motivateurs, vertueux et intrinsèques.
Mais comment bien équilibrer son Octalyse, savoir quels motivateurs doivent être privilégiés ?
Pour vous aider, je vous propose d’étudier les profils des joueurs !
Je vais vous présenter ici les typologies de joueurs définis par deux références incontournables : Richard Bartle, chercheur reconnu sur les jeux vidéos et Nicole Lazzaro, qui dispose de plus de 20 ans d’expertise en conception de l’expérience des joueurs.
Richard Bartle identifie quatre catégories de joueurs ayant des degrés d'intérêt variables pour agir ou interagir avec d'autres joueurs ou l'environnement de jeu.
Achievers : ils aiment agir sur l’environnement du jeu (les “achievers” représentent 10% des joueurs). Ces personnes mettent en avant l'aspect ludique du virtuel. Elles aiment faire des choses pour atteindre des objectifs définis, faisant ainsi progresser leur personnage dans le système de classement intégré au monde.
Socializers : leur moteur est d’interagir avec les autres joueurs (80% des joueurs sont des “socializers”). Ce sont des personnes pour qui la plus grande récompense est l'interaction avec d'autres personnes, par l'intermédiaire du virtuel. Une partie des joueurs choisissent de jouer en incarnant leur propre identité, tandis que d'autres préfèrent s'immerger dans un rôle fictif.
Explorers : ce qui les motive, c’est le fait d’interagir avec l’environnement du jeu (cette part regroupe 10% des joueurs). Le plaisir ultime des “explorateurs” est d'accroître leurs connaissances sur le fonctionnement du monde virtuel. Leur joie réside dans la découverte. Ils recherchent la nouveauté.
Killers : agir sur les autres joueurs (les “Killers” représentent 1% des joueurs). Les personnes qui veulent dominer les autres. Le moyen classique est de les attaquer ou de leur rendre la vie difficile, mais cela peut aussi se manifester de manière moins évidente, comme la politique, les rumeurs, le pédantisme ou le maternalisme culpabilisant.
Nicole Lazzaro dévoile également d'autres types de joueurs dont certains sont assez similaires avec les joueurs de Bartle, à travers un concept nommé “4 Keys 2 Fun” :
Si l’on met en parallèle les principes du 4 Keys 2 Fun avec les points poussés par Richard Bartle, nous pouvons réaliser des comparaisons intéressantes :
Les “Hard fun” ressemblent aux “Achievers” : ils jouent pour accomplir des challenges.
De même, les “People fun”, tout comme les “Socializers”, jouent pour créer du lien social.
Les “Easy fun”, quant à eux, jouent pour exprimer leur créativité et assouvir leur curiosité, un peu comme les “Explorers”.
Cependant, Nicole Lazzaro évoque un profil différent, les “Serious fun”. Ces derniers jouent lorsque cela a du sens dans le monde réel. Nicole Lazzaro, en revanche, ne fait pas référence aux “Killers”.
Je suis sûr que si vous êtes arrivés jusqu'ici, vous devez commencer à faire des liens avec l’Octalyse, non ?
Faisons l’exercice de placer les profils de joueurs sur l’Octalyse :
Finalement, ce n’était pas si difficile, la plupart sont évidents. Il y a tout de même le Killer, placé du côté “Ownership”, en partant du principe qu’il considère les autres joueurs davantage comme des “objets” sur lesquels il a du pouvoir, plutôt que des personnes avec lesquelles il souhaite réellement tisser des relations.
Ce qui saute aux yeux, c’est que les profils de joueurs sont plutôt placés au sommet de l’Octalyse correspondant aux motivateurs vertueux : aucun vers le bas… Mon analyse est qu’il est important de cibler les profils visés par des motivateurs vertueux, intrinsèques ou extrinsèque, et d’en faire le cœur de l’expérience.
Cependant, ne négligez pas les autres motivateurs plus “vicieux”, ils sont terriblement efficaces pour faire une gamification très impactante !
Vous mettez ainsi toutes les chances de votre côté pour concevoir une expérience engageante sur le long terme !
Et maintenant, comment rendre concret ces analyses ?
TiDoME est un acronyme reprenant 4 principes :
THINK IT DEEP : rely on the best gamification frameworks.
Fondez-vous sur les meilleures structures de gamification et cadres de référence disponibles pour guider votre conception.
DO IT QUICK : be agile, keep simple and iterate.
Soyez agile dans votre approche, maintenez la simplicité et itérez régulièrement pour perfectionner votre solution.
MAKE IT ALIVE : bring life with emotional design.
Insufflez de la vie à votre projet en intégrant un design émotionnel qui engage les utilisateurs et suscite une connexion émotionnelle.
ENJOY IT : have fun to procure fun.
Prenez plaisir à ce que vous faites et cherchez constamment à offrir une expérience conviviale et plaisante à vos utilisateurs.
Maintenant que vous connaissez les rouages et les outils de la gamification, que vous disposez de données concrètes sur le sujet, vous pouvez les exploiter dans votre application mobile pour augmenter l’engagement et la rétention de vos utilisateurs.
Mais attention, la gamification des applications est puissante et peut créer des comportements addictifs : à vous de rester du bon côté ! ;)
Merci d’avoir pris le temps de lire.